L’ivrogne, le lampadaire et le bonheur.

L’ivrogne, le lampadaire et le bonheur.

Donner et recevoir

Il y a 16 ans de cela, quand j’ai commencé à pratiquer l’écoute bénévole des personnes en souffrance, j’ai entamé un long chemin de gratitude.

J’ai tellement, tellement appris grâce aux personnes qui se sont confiées à moi.

Ce que j’ai entendu m’a changée.

En mieux.

J’ai écouté des histoires de passions, de trahison, de pertes, de solitude, de confusion, d’espoir …

J’ai admiré des personnes au courage inouï face au destin, face au handicap, y compris mental.

J’en ai compris d’autres qui n’avaient tout simplement plus la force, et voulaient en finir avec trop de souffrance.

J’ai aussi eu de la peine pour des pervers perdus dans leurs délires, des manipulateurs … Enfermés dans leur incapacité à établir un échange avec l’autre.

Recevoir et restituer … faire  circuler

La personne la plus volontaire et la plus déterminée à améliorer sa vie que j’ai entendue était handicapée mentale.

Son esprit était simple comme celui d’un enfant.

Quelle leçon. Quelle claque !

Elle m’a mis les larmes aux yeux. J’avais des frissons en l’écoutant.

Et aujourd’hui encore en y pensant.

Je ne l’oublierai jamais, cette toute jeune fille.

Pas de parents, une vie en foyer, un handicap mental et une volonté de fer ! Une lucidité totale !

Aucune plainte chez elle !

Uniquement la détermination à être heureuse. Autonome. Et fière !!

Oui, fière !

Consciente de son retard mental, elle voulait faire le maximum avec les capacités dont elle disposait !

Elle se programmait des petits objectifs.

Et elle récompensait chacun de ses progrès.

Elle s’offrait des fleurs avec l’argent qu’elle gagnait en faisant la plonge, un peu en douce de la légalité …

Je ne me souviens pas si elle savait lire.

En revanche je me souviens de m’être demandé combien d’adultes « intelligents », voir hautement éduqués, amateurs de développement personnel, était capables d’une telle détermination.

Et moi même, étais-je digne de m’envisager comme son égale ?

Avais-je comme elle, la sagesse de distinguer les choses sur lesquelles je pouvais agir et celle sur lesquelles je n’avais pas de prise ?

Etais-je capable de me projeter avec détermination dans un avenir incertain ?

De me surpasser ?

Clairement non.

Je n’avais pas sa force.

Ni sa lucidité.

Mon mental tournait comme un hamster dans sa cage.

Malgré les apparences , je vivais dans un monde de confusion.

La confusion est le principal obstacle au bonheur.

L’incapacité à savoir ce qu’on veut changer.

Ce qu’on veut VRAIMENT (Pas seulement les rêveries superficielles, qui ne coûtent rien et nous tiennent dans un faux confort, dans « l’illusion de faire ».)

L’incapacité à savoir qui on est.

Et même à savoir ce que l’on aime.

L’incapacité à savoir comment faire pour être heureux. Par où commencer.

Livrogne et le lampadaire

Vous connaissez peut-être cette histoire comique et absurde, de l’ivrogne qui cherche ses clefs sous un lampadaire.

Pourquoi sous le lampadaire ?

Parce que c’est-là qu’il y a de la lumière.

Nous sommes souvent des ivrognes du bonheur, nous le cherchons là où il n’est pas.

Juste parce qu’il y a de la lumière.

Kennedy et la vie qui vaut la peine

« Le produit national brut ne tient pas compte de la santé de nos enfants, de la qualité de leur éducation ou de la joie de leur jeux. Il n’inclut pas la beauté de notre poésie ou la force de nos mariages, l’intelligence de nos débats publics ou l’intégrité de nos élus. Il ne mesure ni notre ingéniosité, ni notre courage; ni notre sagesse, ni nos apprentissages; ni notre compassion, ni notre dévouement envers notre pays. Il mesure tout en somme, sauf ce qui fait que la vie vaut la peine d’être vécue. » Robert Kennedy 1968.

 

Les bénéfices de la gratitude

J’ai reçu en l’espace de quelques heures plusieurs remerciements fortement exprimés, et cela m’a donné envie de vous parler de l’usage de la gratitude et du don pour être heureux.

«Donner, recevoir, restituer» sont les modalités d’un véritable échange, d’une vraie relation.

Dans mon métier, je donne de l’écoute, de l’attention, de la confiance, du soutien, de l’espace, de l’acceptation. Je reçois de la confiance, de l’intimité, de la gratitude.

Pour moi cette gratitude librement exprimée est d’abord professionnellement utile, puisqu’elle me montre la qualité de ma pratique, me permet de me situer. Ensuite, elle est personnellement vivifiante: devant les effets concrets de mes interventions, je suis encouragée à persister dans ce métier et à toujours croire dans le potentiel humain à changer, à progresser, à s’actualiser, à vivre le bonheur.

Pour la personne qui exprime sa gratitude, je crois que les bénéfices sont d’abord le partage de la joie, de l’élan vital, du soulagement. La gratitude permet aussi de voir en face tout ce qui est beau en soi et autour de soi, dans l’humain, dans la vie et la relation.

La gratitude, c’est donc de la joie en partage. Ayant reçu cette joie, j’ai eu envie de la restituer.

Merci donc à Marie-Noëlle (Haute-Savoie), Sonia, (Marne), et Dominique (Yvelines) pour leurs mots si chaleureux !

Et à mon tour, j’exprime ma gratitude à mon graphiste, Steve Rebeyrol qui vient de me livrer de splendides cartes de visites, et au créateur de mon site web, Jean-Baptiste Cavenne qui ne ménage pas son temps et ses conseils.

Je termine ce billet avec les mots de André Comte-Sponville à propos de la gratitude, dans «Petit traité des grandes vertus »

« La gratitude est la plus agréable des vertus; non pourtant la plus facile …/… La gratitude est un second plaisir qui en prolonge un premier: comme un écho de la joie à la joie éprouvée, comme un bonheur en plus pour un plus de bonheur. Quoi de plus simple ? Plaisir de recevoir, joie d’être joyeux: gratitude. Que ce soit une vertu dit pourtant assez qu’elle ne va pas de soi, qu’on peut en manquer, et qu’il y a quelques mérites en conséquence à la ressentir »